Chasse royale by Jean-Philippe Jaworski

Auteur:Jean-Philippe Jaworski [Jaworski, Jean-Philippe]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantasy
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

– Il a beau jeu de parler des traditions, celui qui est nourri par le meurtrier de son père ! » lance quelqu’un dans la foule, qui pourrait fort être Merogaise.

Avant même que je ne puisse réagir, Sumarios et Drucco répliquent, l’air terrible, injuriant la troupe qui nous encercle, défiant Atectos et Loscios de venir en découdre avec eux. Le point de non retour est sans doute franchi ; les duels semblent inévitables, sinon pire, quand un nouveau héros intervient, en fendant les rangs adverses.

« Arrêtez ! Arrêtez, tas de branques ! braille-t-il avec un fort accent aulerque. Les rois arrivent ! »

Il vient s’interposer entre Atectos et notre petite bande, en nous tournant le dos, et je reconnais la carrure trapue et le cou épais de mon ami Satobogios. Il se retrouve pris à partie aussi violemment que nous, mais tient tête sans désemparer à la colère des guerriers.

« Ramassis de crétins ! rugit-il. Bellovèse, je le connais : il est des nôtres ! Pas seulement parce que c’est mon frère d’armes ! C’est le fils de Sacrovèse, le premier allié du grand druide ! C’est le fils de Dannissa, la reine des Turons ! C’est l’ami d’Articnos, roi des Éduens ! Et vous, tas de bœufs, vous voulez lui faire sa fête ? »

Sa harangue soulève un tollé des plus véhéments. Atectos et Loscios viennent se planter devant lui, le lorgnent dans le blanc des yeux, et les trois fiers-à-bras crispent le poing sur leurs armes. Satobogios ne nous aura fait gagner que quelques instants ; au moins sera-t-il de notre côté si nous devons en découdre. D’un regard, avec Sumarios, nous nous mettons d’accord. Nous sommes sur le point de charger quand un timbre rauque tonitrue :

« Vos gueules, les jaseuses ! Vos gueules ! »

Une autre brute joue des coudes dans notre direction. J’ai d’abord du mal à identifier le gaillard parce qu’il a le visage tuméfié et un œil poché, mais le tartan qu’il a replié en bandoulière est aux couleurs éduennes, et son buste velu est large en diable. Plus alarmant encore : deux têtes fraîchement coupées, accrochées à son ceinturon d’armes, maculent ses braies de sang. Aux cris de ses comparses, qui n’ont pas apprécié sa sommation et l’interpellent bruyamment, je le reconnais après coup : il s’agit de Uercobios le Batailleur, le champion du roi éduen. À en juger par la teinte noirâtre de ses ecchymoses, il a drôlement encaissé au cours de son combat contre Bouos.

« Vos gueules ! répète-t-il. Satobogios a raison : on ne touche pas à Bellovèse sans l’accord d’Articnos. Les rois arrivent ! »

En effet, dans son sillage apparaissent d’autres soldures, carnutes et éduens. Parmi eux s’avancent Orbiotalos et Articnos.

Le souverain carnute a perdu son air aimable ; en fait, il nous jette un regard sinistre. Son élégant costume porte divers accrocs ; plusieurs estafilades griffent son menton et lui donnent un air bien plus affirmé que la veille au soir, quand il présidait le banquet entre mon oncle et le grand druide.

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